mercredi 20 mai 2009

Rapport 2008 de la MIVILUDES: extraits

Voici, tel que promis, des extraits du rapport 2008 de la MIVILUDES concernant les actions de la secte de scientologie. Le rapport intégral est disponible ici.

Pages 47-55, à propos des techniques de manipulation qu'emploie la scientologie afin de faire valoir son discours dans les ONG et à l'ONU:

Le 22 mai 2008, Le journal La Croix titrait à la une : « Conseil des droits de l’Homme de l’ONU : quand la France est épinglée » et renvoyait à un article sur « les droits de l’Homme malmenés » dans lequel, entre autres mises en cause (surpopulation carcérale, interdiction des signes religieux ostentatoires, etc.), il était mentionné que deux ONG américaines « s’en [prenaient] à la Miviludes qui selon elles, “[avait] contribué à la stigmatisation de certains groupes religieux en France” [...]. Un avis partagé par “Droits de l’Homme sans frontières”, pour qui la Miviludes favorise “la discrimination raciale en stigmatisant des groupes religieux minoritaires” ».

On ne peut être qu’interpellé par la violence de telles accusations. Pourtant, replacées dans le contexte du lobbying de la mouvance sectaire, celles-ci revêtent une autre dimension et sont riches d’enseignement sur la stratégie de désinformation de ceux qui ont l’art de renverser les rôles en se faisant passer pour les victimes d’atteintes aux droits de l’Homme alors qu’ils n’ont de cesse de les bafouer. D’où la nécessité de s’arrêter sur ce qui s’est réellement passé à l’ONU.

Dans des contextes procéduriers différents ci-après explicités, sont intervenus soit les mouvements eux-mêmes en direct, soit des Organisations non gouvernementales (ONG) ou Organisations internationales non gouvernementales (OING) dont les discours servent implicitement leur cause. En vue de l’examen par le Conseil des droits de l’Homme dans le cadre de la nouvelle procédure de l’examen périodique universel (EPU), les doléances des uns et des autres ont été compilées dans un document servant de base, avec d’autres, à l’examen de la situation française :

– Le mouvement raélien européen y formule une plainte pour discrimination religieuse.

– Le Centre d’information et de conseil des nouvelles spiritualités (CICNS) y énonce « les dérives de la lutte antisectes » à travers une longue énumération de faits et gestes qui, à ses dires, étayent son analyse.

– Human Rights Without Frontiers (HRWF) critique particulièrement les activités de la Miviludes et des associations de familles de victimes de dérives sectaires et conteste vivement le soutien apporté par l’État par le biais du versement de subventions de fonctionnement.

– The Institute on Religion and Public Policy (IRPP) axe ses critiques sur la loi About-Picard, sur la formation des magistrats et contre la Miviludes.

– The Becket Fund for Religious Liberty (BFRL), spécialiste du contexte juridique de la liberté de religion, cible plus particulièrement la loi About-Picard.

Par ailleurs les raéliens de France, Suisse, Belgique et du Québec ont alerté le Haut Commissariat aux droits de l’Homme sur les discriminations dont ils font l’objet en déposant vingt-cinq nouvelles plaintes au mois de juin, sans suites à ce jour.

Le 21 mai 2008, la Coordination des associations et particuliers pour la liberté de conscience (CAP-LC) a adressé une réclamation à l’attention de M. Leandro Desquoy, rapporteur spécial sur l’indépendance des juges et des magistrats et de Mme Asma Jahangir, rapporteure spéciale pour la liberté de religion et de croyance. Ce texte, soumis par l’avocat américain de la scientologie au nom de l’association, concerne « les violations du droit à un procès équitable et l’indépendance du système judiciaire français ».

(...)

La CAP-LC est une association française « créée en 2000 pour unir les minorités religieuses afin de lutter contre la discrimination concernant le droit à la liberté de conscience et de croyance et pour dénoncer des actes et des discours qui violent les droits de l’Homme ou qui représentent une menace pour les libertés fondamentales ». Elle est surtout connue pour sa promptitude à critiquer depuis des années toute initiative de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires. La CAP-LC dit compter parmi ses membres « des nombreux adhérents à des minorités de conviction visées en tant que “sectes” par des mesures discriminatoires du gouvernement ». Le rapport 2007 expliquait que ses argumentaires et ses méthodes d’intervention laissaient à penser que la scientologie comptait parmi ses inspirateurs, ce dont atteste l’actualité onusienne. En effet, c’est l’avocat américain de ce mouvement qui a soumis la plainte de la CAP-LC à l’ONU. Par ailleurs, le rapport 2008 du Département d’État américain sur La liberté religieuse dans le monde présente la réclamation comme émanant de l’Église de scientologie 6, et non de la CAP-LC. La confusion est ainsi tout à la fois entretenue pour certains, mais levée pour ceux qui veulent décrypter les stratégies.

(...)

Concernant les OING, deux d’entre elles, Human Rights Without
Frontiers International (HRWF) et The Institute on Religion and Public Policy (IRPP), très actives dans la défense des minorités religieuses, critiquent régulièrement la politique française de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires, notamment à l’OSCE. Leurs actions, leur place dans le réseau du lobbying prosectaire voire leurs connections avec la scientologie notamment, ont été largement décryptées dans le rapport 2007 de la Miviludes.

(...)

Outre ces cibles récurrentes ici repérées et censées être à l’origine d’« atteintes à la liberté religieuse » depuis une dizaine d’années, on en observe de nouvelles qui ont fait récemment l’actualité de la lutte contre les dérives sectaires dans notre pays : d’une part la loi sur la protection juridique des témoins devant les commissions d’enquête parlementaire, dans laquelle le CICNS voit une « intention d’empêcher les personnes diffamées par les rapports parlementaires de se défendre », d’autre part le rapport confié à Georges Fenech par le Premier ministre La justice face aux dérives sectaires dont l’annonce a fondé la réclamation de la CAP-LC précitée. Cette réclamation qui reprend les critiques répandues depuis plusieurs années par la scientologie et ses alliés à l’encontre de la France en les habillant d’une coloration juridique n’est manifestement qu’un prétexte. En effet, dès les premières lignes puis à de nombreuses reprises, on comprend qu’il s’agit avant tout de dénigrer l’auteur du rapport visé.

On a pu entendre les mêmes attaques ad hominem reproduites presque mot pour mot à la tribune de l’OSCE au mois d’octobre 2008, à l’occasion de la Conférence annuelle d’examen de la dimension humaine à Varsovie, attaques par ailleurs développées sur Internet par des membres français bien connus de la scientologie. Cette pratique s’apparente à la méthode dite de « propagande noire » qui est la marque d’un célèbre mouvement sectaire et qui consiste à dénigrer par tous les moyens ceux qui le combattent, à « dépopulariser l’ennemi jusqu’au point de l’effacer totalement » comme le recommandait son gourou fondateur.

La représentation permanente de la France près l’OSCE, par la voix du conseiller aux affaires religieuses du ministère des Affaires étrangères, s’était alors publiquement élevée pour relever que « les attaques ad hominem contre le Président de la Miviludes, nommé par décret du Président de la République, [relevaient]
de la diffamation et se [dispensaient] de tout commentaire».

(...)

Le système onusien est d’une grande complexité pour le grand public qui n’en retient guère que le rôle – la promotion d’idéaux comme la paix dans le monde, le développement et le respect des droits de l’Homme – ainsi qu’un logo aisément identifi able. Toute référence à l’ONU est un gage de respectabilité et certains mouvements n’hésitent pas en user, voire pour certains, à en abuser.

Il en est ainsi de la revendication du « statut consultatif » comportant lui-même plusieurs catégories qui « hiérarchisent » les ONG affi liées. Ce statut ne doit pas être confondu avec « l’association d’une OING avec le Département de l’information des Nations unies », qui permet seulement d’accéder aux locaux de l’ONU, de recevoir des informations mais en aucun cas de participer aux conférences.

À ce titre, l’exemple de Friends of United Nations cité dans le rapport 2006, une OING connue pour avoir participé à des actions en France aux côtés de la scientologie, est instructif. Sur son site Internet, cette organisation qui affiche un logo dont le visuel plagie sans complexe celui de l’ONU, se présente, à juste titre, comme « associée au département de l’information publique des Nations unies » (DPI). Cela peut ainsi laisser croire qu’elle bénéficie du prestigieux statut consultatif et qu’elle est incorporée au système des Nations unies alors que la simple association au DPI ne le lui permet nullement. Mais qui est capable de faire la différence, à part les spécialistes de ces questions? Les lobbies sectaires le savent et ils jouent sans scrupule de cette complexité.

Il est arrivé par le passé que notre pays fasse l’objet d’observations de la rapporteure spéciale sur la liberté de religion ou de croyance 20. Toutefois, malgré ces remarques et les contributions du lobby « prosectaire » précitées, il convient de noter que le document fi nal concernant la France adopté le 13 juin 2008 dans le cadre de l’EPU ne comporte aucune conclusion et/ou recommandation concernant la politique de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires et, qu’à ce jour, les réclamations déposées par la CAP-LC n’ont pas donné suite à une procédure de questionnement de la France. Les « donneurs d’ordre » se sont bien gardés de le préciser.

Mais l’effet d’annonce peut être garanti lorsque le très officiel rapport 2008 du Département d’État américain sur La liberté religieuse dans le monde rend compte des doléances des lobbies sectaires. C’est le cas dans le dernier en date, qui fait état d’une « réclamation engagée contre la France par la scientologie », à l’ONU auprès du rapporteur spécial sur l’indépendance des juges et des avocats. Il s’agit en fait de la réclamation déposée par l’avocat américain de la scientologie au nom de la CAP-LC qui, de son côté, vante son intervention dans un communiqué intitulé : « L’activisme militant de Georges Fenech rapporté à l’ONU ». Dans le même communiqué, la CAP-LC se targue d’ailleurs d’avoir aussi dénoncé « auprès de l’ONU [...] la diffamation dont sont victimes certaines religions », plus précisément auprès du haut commissaire aux droits de l’Homme dans le cadre de la mise en place de la résolution 62/154 sur “la lutte contre la diffamation des religions” ».

L’écho de ces plaintes et réclamations a été largement relayé quelques mois plus tard par d’autres voix lors de la Conférence annuelle d’examen de la dimension humaine organisée à Varsovie par le Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’Homme (institution de l’OSCE), et il est depuis démultiplié grâce aux vertus d’Internet que le lobby sectaire ne manque pas d’alimenter, alors même qu’aucune suite n’a été donnée à ce jour à ces actions qui s’analysent comme de purs effets d’annonce.



Pages 139-141, à propos des actions de la Commission des citoyens pour les droit de l'homme, un groupe paravent de la secte de scientologie.

Contribution du ministère du Travail, des Relations sociales, de la Famille et de la Solidarité

La Direction générale de l’action sociale (DGAS) est en charge de la prévention et du traitement des dérives sectaires, (...), qui permet d’assurer la protection des personnes. Des dérives de plus en plus nombreuses, qui peuvent être qualifiées de sectaires, visent en effet des personnes fragiles, en difficulté, marginalisées ou à protéger.

Trois domaines principaux sont suivis par la DGAS à ce titre et font l’objet d’analyses et de directives aux services déconcentrés ou autres acteurs.

(...)

- Le champ solidarité

On assiste également au développement de dérives visant l’État dans le domaine médico-social. C’est ainsi que l’un des « satellites » de l’Église de scientologie, la Commission des citoyens pour les droits de l’Homme (CCDH), a adressé aux DDASS un Guide pour les visites d’un hôpital psychiatrique. La CCDH proposait même aux services du ministère de la Santé et des Solidarités de les « accompagner » dans leurs missions d’inspection. D’autres groupes ont développé des actions allant dans le même sens.

Il convient de souligner en conclusion que compte tenu des fragilités des publics concernés, la réalité des dérives sectaires est importante. Elle prend diverses formes, allant du « simple » prosélytisme à la constitution de structures à caractère sectaire dans les champs cités ci-dessus. Ceci est d’autant plus préoccupant que ces pratiques se déroulent le plus souvent dans le cadre d’une
relation interpersonnelle.

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